Que serait Ottignies aujourd'hui sans le développement de Louvain-la-Neuve ?
Sur un bon quart du territoire ottinois, l'UCL règne en maître absolu. Un poids que la la ville tente parfois d'infléchir. Sans le contester fondamentalement. Que serait Ottignies aujourd'hu sans le développement de Louvain-la-Neuve?
Les incollables sur les récits des débats du conseil communal ottintois connaissent bien la marge de manœuvre parfois filiforme d'une majorité courte (15 conseillers sur 29) et atypique réunissant Ecolo-CDH et Démocratie Nouvelle.
L'on connaît sans doute moins le poids de l'Alma Mater sur une partie de la ville sortie de terre il y a un peu plus de trente ans. Un poids que l'ancien bourgmestre Jacques Otlet résume avec une formule lapidaire : « L'UCL, c'est un Etat dans l'Etat ».
Comment pourrait-il d'ailleurs en être autrement ? À la fin des années soixante, grâce à un crédit de 764 millions de francs belges accordé par l'Etat, l'Université se retrouva propriétaire d'un peu plus de neuf cents hectares. Une opération immobilière unique en Belgique !
Nous avons dû jouer tous les rôles : concepteur, organisateur, gestionnaire des infrastructures, réalisateurs de crèches… Des rôles qui, dans d'autres villes universitaires, sont partagés avec les pouvoirs publics, explique Jean-Claude Nihoul, le directeur de l'administration des Domaines. Si l'UCL, décidée à créer une cité accueillant habitants et étudiants, débarquait avec une armada de spécialistes, quelques personnes seulement officiaient au service des travaux et de l'urbanisme ottintois…
Le contraste s'est réduit aujourd'hui. Mais le budget de l'UCL, le plus gros lotisseur, le plus gros employeur de la région (4.500 personnes) représente tout de même encore dix fois celui de la Ville. Le résultat : sur un bon quart du territoire communal, peuplé par 8.000 habitants - étudiants non compris -, nombre qui grimpera à 12.000 une fois achevés les derniers lotissements des Bruyères, rien ne se décide sans l'aval de l'UCL. Dans les domaines de l'aménagement du territoire et du développement économique, s'entend. Promoteurs, investisseurs, entrepreneurs s'adressent directement à l'administration des Domaines, le collège n'entrant en scène qu'au dernier acte : la délivrance du permis de bâtir, autrement dit quand les choses sont déjà bien ficelées. Les voiries sont reprises par la ville lorsqu'un quartier est terminé. En cas de problème (dégradation des rues…), les nouveaux habitants ne savent à quel saint se vouer. Alors, la plupart téléphonent à la fois à l'UCL et à la Ville, explique le bourgmestre, Jean-Luc Roland.
À situation unique, lieux de paroles uniques. Une bipartite réunit, deux fois par an, les autorités communales et universitaires… Son objectif a été de préciser le rôle de chacun. Il a fallu du temps pour trouver la bonne mesure, poursuit Jean-Claude Nihoul. « À vous de gérer les débordements de vos étudiants lors des 24 heures vélo », nous disait la Ville. « À vous de faire régner l'ordre sur le territoire communal », rétorquions-nous. On en venait à mesurer, mètre par mètre, les responsabilités de chacun sur le tracé.
Pourtant le menu chargé des ordres du jour le laisse deviner : ces bipartites sont des lieux de concertation, pas de décisions. Au contraire de réunions plus informelles, plus animées.
Lors de l'affaire de la zone Okupée (les squats de la nationale 4 que l'UCL souhaitait démolir), le ton a monté, raconte l'échevin Jacques Lega. Lorsque le commissaire de police a dressé le tableau d'une expulsion manu militari des occupants, avec chevaux de frise et blocage de la N4, le prorecteur Gabriel Ringlet a vite compris que cela offrirait une image plutôt désastreuse pour l'UCL. Et le risque d'une présence accrue des expulsés sur ou sous la dalle néolouvaniste a sans doute aussi influencé la décision (provisoire) de ne démolir que deux des quatre maisons.
Autre sujet chaud : l'aménagement des lotissements Bruyères 9, 10, 11 et 12. Nous souhaitions davantage d'équipements collectifs et la garantie que se réalise la passerelle au niveau de l'avenue des Coteaux ; l'UCL souhaitait rentabiliser davantage ce vaste espace. La discussion, parfois violente, a duré plus d'un an, ajoute le bourgmestre.
La couleur de la majorité facilite-t-elle la cohabitation des deux pouvoirs ? C'est plutôt une question d'hommes, explique-t-on des deux côtés. Mais d'autres influences se font sentir parfois.
La ville et le fonctionnaire délégué souhaitaient implanter la Grande Aula davantage à front de la Grand-Place, rappelle Jacques Otlet. L'UCL voulait y réserver une place pour son futur musée. Le feu vert est venu du ministre de l'Aménagement du territoire, Michel Lebrun (PSC). Sans attendre l'avis de la Ville.
Au conseil communal, le professeur Michel Woitrin, ancien administrateur général de l'UCL, brille par son absence aux côtés des autres conseillers IC. Pourtant, Michel Woitrin est loin d'être inactif. Il aurait même pris l'initiative de convoquer des spécialistes et d'utiliser ses dons de diplomate pour régler le problème né de la volonté du groupe Klépierre de créer deux quais de déchargement supplémentaires près de la place de l'Accueil. Des changements qui nécessitent déplacement d'arrêts de bus et modification du permis de bâtir accordé au projet de l'Esplanade. Autrement dit celui qui « fit prendre la mayonnaise de Louvain-la-Neuve » (selon l'expression de l'historien français Emmanuel Leroy-Ladurie) se démène encore pour ôter l'énième peau de banane sur la (longue) route du projet qui terminera le centre.·
Sur un bon quart du territoire ottinois, l'UCL règne en maître absolu. Un poids que la la ville tente parfois d'infléchir. Sans le contester fondamentalement. Que serait Ottignies aujourd'hu sans le développement de Louvain-la-Neuve?
Les incollables sur les récits des débats du conseil communal ottintois connaissent bien la marge de manœuvre parfois filiforme d'une majorité courte (15 conseillers sur 29) et atypique réunissant Ecolo-CDH et Démocratie Nouvelle.
L'on connaît sans doute moins le poids de l'Alma Mater sur une partie de la ville sortie de terre il y a un peu plus de trente ans. Un poids que l'ancien bourgmestre Jacques Otlet résume avec une formule lapidaire : « L'UCL, c'est un Etat dans l'Etat ».
Comment pourrait-il d'ailleurs en être autrement ? À la fin des années soixante, grâce à un crédit de 764 millions de francs belges accordé par l'Etat, l'Université se retrouva propriétaire d'un peu plus de neuf cents hectares. Une opération immobilière unique en Belgique !
Nous avons dû jouer tous les rôles : concepteur, organisateur, gestionnaire des infrastructures, réalisateurs de crèches… Des rôles qui, dans d'autres villes universitaires, sont partagés avec les pouvoirs publics, explique Jean-Claude Nihoul, le directeur de l'administration des Domaines. Si l'UCL, décidée à créer une cité accueillant habitants et étudiants, débarquait avec une armada de spécialistes, quelques personnes seulement officiaient au service des travaux et de l'urbanisme ottintois…
Le contraste s'est réduit aujourd'hui. Mais le budget de l'UCL, le plus gros lotisseur, le plus gros employeur de la région (4.500 personnes) représente tout de même encore dix fois celui de la Ville. Le résultat : sur un bon quart du territoire communal, peuplé par 8.000 habitants - étudiants non compris -, nombre qui grimpera à 12.000 une fois achevés les derniers lotissements des Bruyères, rien ne se décide sans l'aval de l'UCL. Dans les domaines de l'aménagement du territoire et du développement économique, s'entend. Promoteurs, investisseurs, entrepreneurs s'adressent directement à l'administration des Domaines, le collège n'entrant en scène qu'au dernier acte : la délivrance du permis de bâtir, autrement dit quand les choses sont déjà bien ficelées. Les voiries sont reprises par la ville lorsqu'un quartier est terminé. En cas de problème (dégradation des rues…), les nouveaux habitants ne savent à quel saint se vouer. Alors, la plupart téléphonent à la fois à l'UCL et à la Ville, explique le bourgmestre, Jean-Luc Roland.
À situation unique, lieux de paroles uniques. Une bipartite réunit, deux fois par an, les autorités communales et universitaires… Son objectif a été de préciser le rôle de chacun. Il a fallu du temps pour trouver la bonne mesure, poursuit Jean-Claude Nihoul. « À vous de gérer les débordements de vos étudiants lors des 24 heures vélo », nous disait la Ville. « À vous de faire régner l'ordre sur le territoire communal », rétorquions-nous. On en venait à mesurer, mètre par mètre, les responsabilités de chacun sur le tracé.
Pourtant le menu chargé des ordres du jour le laisse deviner : ces bipartites sont des lieux de concertation, pas de décisions. Au contraire de réunions plus informelles, plus animées.
Lors de l'affaire de la zone Okupée (les squats de la nationale 4 que l'UCL souhaitait démolir), le ton a monté, raconte l'échevin Jacques Lega. Lorsque le commissaire de police a dressé le tableau d'une expulsion manu militari des occupants, avec chevaux de frise et blocage de la N4, le prorecteur Gabriel Ringlet a vite compris que cela offrirait une image plutôt désastreuse pour l'UCL. Et le risque d'une présence accrue des expulsés sur ou sous la dalle néolouvaniste a sans doute aussi influencé la décision (provisoire) de ne démolir que deux des quatre maisons.
Autre sujet chaud : l'aménagement des lotissements Bruyères 9, 10, 11 et 12. Nous souhaitions davantage d'équipements collectifs et la garantie que se réalise la passerelle au niveau de l'avenue des Coteaux ; l'UCL souhaitait rentabiliser davantage ce vaste espace. La discussion, parfois violente, a duré plus d'un an, ajoute le bourgmestre.
La couleur de la majorité facilite-t-elle la cohabitation des deux pouvoirs ? C'est plutôt une question d'hommes, explique-t-on des deux côtés. Mais d'autres influences se font sentir parfois.
La ville et le fonctionnaire délégué souhaitaient implanter la Grande Aula davantage à front de la Grand-Place, rappelle Jacques Otlet. L'UCL voulait y réserver une place pour son futur musée. Le feu vert est venu du ministre de l'Aménagement du territoire, Michel Lebrun (PSC). Sans attendre l'avis de la Ville.
Au conseil communal, le professeur Michel Woitrin, ancien administrateur général de l'UCL, brille par son absence aux côtés des autres conseillers IC. Pourtant, Michel Woitrin est loin d'être inactif. Il aurait même pris l'initiative de convoquer des spécialistes et d'utiliser ses dons de diplomate pour régler le problème né de la volonté du groupe Klépierre de créer deux quais de déchargement supplémentaires près de la place de l'Accueil. Des changements qui nécessitent déplacement d'arrêts de bus et modification du permis de bâtir accordé au projet de l'Esplanade. Autrement dit celui qui « fit prendre la mayonnaise de Louvain-la-Neuve » (selon l'expression de l'historien français Emmanuel Leroy-Ladurie) se démène encore pour ôter l'énième peau de banane sur la (longue) route du projet qui terminera le centre.·