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Le Toulouse Renaissance

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(Site originel : https://sites.google.com/view/toulouse-renaissance/introduction)

L'architecture toulousaine de la Renaissance


Bibliographie
3 sources m'ont pour l'essentiel servi à constituer ce sujet :
- Le livre Hôtels et demeures de Toulouse et du Midi Toulousain (Guy Ahlsell de Toulza, Louis Peyrusse, Bruno Tollon) - 1997.
- Le dossier du numéro de mars 2010 de La revue des vieilles maisons françaises (VMF), n° 231 : Toulouse, le caractère d'une ville, et en particulier l'article La Renaissance toulousaine : un art idéal pour une ville "élue" (Sarah Muñoz et Colin Debuiche).
- Le catalogue de l'exposition "Toulouse Renaissance" qui s'est tenue du 17 mars au 24 septembre 2018 au Musée des Augustins (direction Pascal Julien).

Je leur emprunte de nombreuses citations, notamment sur les aspects techniques et théoriques. Cependant s'il s'avérait que des inexactitudes ont été écrites ici elles seraient certainement dues à des erreurs de synthèse ou d'interprétation de ma part.




Introduction :

Au 16ème siècle, la Renaissance, qui prônait le retour aux modèles de l'Antiquité romaine, se diffusa en Europe depuis l'Italie par le biais notamment de traités et gravures se référant au traité De Architectura de Vitruve (90-20 avant JC), théoricien romain de l'architecture antique.
Chaque foyer d'érudition et de création réinterpréta ces nouvelles références selon ses traditions locales.

Or au début du 16ème siècle Toulouse vivait une période faste. Elle était la 3ème ville de France, une capitale provinciale riche et puissante que le commerce du pastel était en train de doter de marchands d'envergure internationale, chose rare dans son histoire.
Ajoutons à cela un parlement puissant - le premier de province - dont le ressort s'étendait du Rhône à la Bigorre, une université réputée au-delà même des frontières (en droit notamment), un vaste archevêché, une basilique Saint-Sernin qui passait pour l'un des lieux les plus saints du monde, et nous avons là des facteurs de dynamisme propres à donner aux hommes ambitieux les moyens de parvenir, favorisant un climat d'émulation sociale dans lequel il était important de s'afficher.

Foyer d'érudition et d'humanisme, Toulouse fit bon accueil à la Renaissance et se pencha sur son passé antique prestigieux dont il restait bien peu de vestiges visibles, les anciens monuments romains ayant servi de "carrières de briques" tout au long du Moyen âge.
On renoua avec la Palladia Tolosa des poètes latins Martial, Ausone et Sidoine Apollinaire, la Toulouse antique, placée sous le patronage de la déesse Pallas-Athéna (Minerve) présentée comme protectrice des sciences et des arts. En 1522 l'hôtel de ville de capitulum (chapitre) devint capitolium (capitole), traduisant la volonté d'imiter Rome et ses références antiques.

Une œuvre de 1550, pour laquelle nous ferons une petite entorse au thème de ce fil dédié à l'architecture, nous servira d'illustration de cette ambition toulousaine : une statue en bronze de dame Tholose, œuvre du sculpteur Jean Rancy et du fondeur Claude Pelhot, et personnification toulousaine de la déesse Pallas-Athéna.

Toulouse profita là de la présence de son imposant arsenal (qui fabriquait armes, canons et cloches) pour réaliser la fonte de cette statue de grande taille, une première en France en dehors des ateliers du roi.
Nul, pas même en Italie, ne s'était alors risqué à une œuvre aussi dynamique, campée sur un seul appui (Jean de Bologne fit son Mercure volant plus de 15 ans plus tard). Avec cette œuvre Rancy s'affirme comme étonnamment précoce, par la maîtrise du drap mouillé qui fera la force de Jean Goujon, par la science des gestes, des torsions et des multiples points de vision, principe qui sera théorisé par Cellini, ou encore par l'inédit élancement du corps.
Elle tenait une girouette dans sa main droite et s'appuyait de sa main gauche sur un écu aux armes de la ville. Sur l'écu étaient inscrites les lettres CPQT MDL, soit Capitulum Populusque Tolosanum 1550, "le capitoulat et le peuple de Toulouse" qui, à la manière du SPQR romain, renvoyait à Rome et à l'idée de République urbaine, les capitouls se targuant de siéger au sein d'un Capitole.



La statue - actuellement visible au musée des Augustins - fut placée à l'origine sur le toit du "donjon" du Capitole, lequel accueillait au rez-de-chaussée le Petit consistoire (lieu où se réunissaient les capitouls) et abritait à l'étage les archives de la ville, dont les fameuses annales manuscrites, trésor des capitouls constituant une collection unique en Europe de portraits de consuls municipaux.
Construit entre 1525 et 1530 à une époque où la Renaissance avait tout juste commencé à influencer l'architecture de la ville, le donjon est d'une facture encore gothique... l'un des derniers témoins d'une ère qui se terminait :



Sur une façade du donjon, dans un cadre de pierre disposé à la manière d'un temple antique dont les chapiteaux des colonnes mettent en œuvre la superposition des ordres dorique et ionique, les capitouls se présentent tels des consuls romains. Les blasons ont malheureusement été martelés à la Révolution.
L'inscription en latin gravée dans la pierre annonce : FIEBAT ANNO CHRISTIANAE SALUTIS MDXXV IDIBS NOVEBR NOBILIBUS PREINSIGNITIS CAPITOLINIS DECURIONIBUS, qui signifie "A été fait l'année du salut 1525, aux ides de novembre, par les nobles et très distingués décurions du Capitole".
En se posant en "décurions" siégeant dans un "Capitole" les capitouls de la Renaissance espéraient mettre en avant une légitimité historique remontant à l'Antiquité et dépassant celle des rois de France, face à une administration royale et à un parlement qui tendaient de plus en plus à limiter leurs prérogatives.



Cette prétention du capitoulat (institution créée en 1147) à voir dans la Palladia Tolosa romaine une légitimation de ses privilèges se retrouve dans les manuscrits de l'époque et crée des liens idéalisés entre l'élite toulousaine et la Rome antique, à l'exemple de cette illustration du livre II des Annales (1535) où Pallas est figurée dans un médaillon doré et orné de rinceaux, en faisant la personnification de la ville :



Mais si le ton était donné par les édiles de la ville, c'est cependant surtout dans les demeures privées que l'architecture Renaissance connut à Toulouse sa plus belle expression pendant une bonne centaine d'années. Les propriétaires éclairés de ces fameux hôtels particuliers réclamaient des éléments "à l'anticque", que l'on retrouve surtout sur les fenêtres, portails, cheminées et moulures. Les collections d'antiques comprenant des médailles, on en trouve l'écho dans les nombreux portraits en médaillon sculptés dans les façades de cette époque.

Je rajouterai une dernière note "colorée" à cette introduction : C'est à cette époque faste que la brique - matériau alors onéreux et estimé, contrairement à une idée reçue - commença véritablement à remplacer le bois et le torchis dans les constructions privées. La pierre pour sa part n'était disponible qu'en petite quantité, sa rareté et le coût du transport la rendaient très chère sur le marché local. Elle fut par conséquent un symbole de luxe et ne fut d'ordinaire utilisée que parcimonieusement : pour les décors sculptés et les chaînages notamment.
Si certains propriétaires très fortunés (Bernuy, Clary) s'offrirent le luxe de façades entières en pierre, la plupart usèrent avec bonheur de la polychromie rouge-blanc offerte par son alliance particulièrement réussie avec la brique. Au-delà du seul aspect esthétique, ce jeu de la brique et de la pierre était à la Renaissance une référence recherchée à l'Antiquité toulousaine, notamment aux remparts chantés par Ausone qui faisaient la parure de la Tolosa romaine, et dont il restait des vestiges visibles.

Je ne prétends pas ici vous montrer tous les témoignages de l'architecture Renaissance à Toulouse, car des spécialistes pourraient certainement identifier des éléments Renaissance dans d'autres édifices, mais en voici au moins une présentation de l'essentiel.
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La porte sud de la crypte de Saint-Sernin
C'est le décor de la porte sud de la crypte qui signe l'arrivée dans l'architecture toulousaine de l'art de la Renaissance (Jean Dubois, 1518) :







L'hôtel du Vieux-Raisin (1ère campagne)
C'est ensuite à l'hôtel du Vieux-Raisin (dit aussi de Béringuier-Maynier, 1515-1527) que l'on retrouve ce nouveau style, sur des structures encore gothiques. L'hôtel ayant fait l'objet d'une deuxième campagne à la fin du 16ème siècle (sur laquelle nous reviendrons), c'est sur les deux tours d'escalier et la première travée à gauche que se concentre ce décor.





Au-dessus de la porte de la tour se lit la devise : VIVITUR INGENIO CETERA MORTIS ERUNT, « On vit par l'esprit, tout le reste appartient à la mort ».






Le décor se distingue par sa précision et sa qualité. Personnages sortant de cornes d'abondance, grotesques, rinceaux délicats, bestiaire fantastique sont autant d'ornements distinctifs de la première Renaissance.












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L'hôtel d'Ulmo
Construit entre 1526 et 1536 pour Jean d'Ulmo, président à mortier au Parlement, cet hôtel fut le premier à Toulouse à adopter un escalier droit et non plus à vis. Son beau baldaquin de marbre est plus tardif (début XVIIème siècle sans doute).







La devise de Jean d'Ulmo gravée dans la pierre : DURUM PACIENTIA FRANGO, "Ma patience triomphe de tout". Ironique quand on pense qu'il s'avéra être un corrompu notoire qui finit pendu.




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L'hôtel de Bernuy (cour Renaissance et portail)
La cour Renaissance en pierre a été construite de 1530 à 1536, son architecte fut Louis Privat. Ce dernier était ouvert aux influences espagnoles plateresques et réussit - selon les mots de l'historien Paul Mesplé - à faire vivre l'Espagne, l'Italie et la Loire sous le ciel de Toulouse. En effet l'influence du val de Loire se remarque particulièrement dans les chapiteaux composites, alors que les colonnes-candélabres par exemple sont inspirées des Medidas del romano, traité espagnol de Diego de Sagredo dont on relève également l'influence dans d'autres hôtels particuliers toulousains.






Cette voûte surbaissée était une prouesse architecturale pour l'époque :










Les fameuses colonnes-candélabres de l'hôtel de Bernuy sont inspirées des Medidas del romano, traité espagnol de Diego de Sagredo (1526). Elles ne sont pas les seuls éléments de l'hôtel dans ce cas.




Pour comparaison gravure tirée du traité Medidas del romano :








Le portail sur rue date de la première campagne de construction gothique (1503-1504, putti, devise), mais a été complété lors de la deuxième campagne (médaillons) :




Les médaillons du portail :


La devise des Bernuy est gravée en latin : SI DEUS PRO NOBIS, début d'une phrase de la Bible signifiant "Si Dieu est avec nous, qui sera contre nous ?"




Détail amusant : le N de "NOBIS" a été gravé à l'envers !


Pour preuve de son importance, la cour de l'hôtel de Bernuy a été moulée pour la cité de l'architecture au Palais de Chaillot pour illustrer la première Renaissance en France :
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Le portique de Saint-Sernin
Dans les années 1530 une enceinte fut construite autour de Saint-Sernin, il en reste ce portique au décor Renaissance (qui aurait été retouché au XIXème siècle) :







L'hôtel Dahus-Tournoer
Une partie de cet hôtel date du XVème siècle et de sa construction par le capitoul Pierre Dahus. La tour fut érigée en 1532 par le président du Parlement Paul Tournoer et cache paraît-il le plus bel escalier Renaissance à vis de la ville.
La présence de (faux) créneaux et mâchicoulis ne répond à aucune nécessité défensive, il s'agit d'une marque de seigneurie utilisée comme un symbole. A cette époque, et c'était aussi le cas à l'hôtel de Bernuy initialement, l'architecte devait composer à la fois avec les codes de la Renaissance et avec une quête d'honorabilité qui imposait certaines traditions.










Une devise en latin est inscrite sur la tour : ESTO MIHI DOMINE TURRIS FORTITUDINIS A FACIE INIMICI, « Sois pour moi, Seigneur, une tour de courage face à l'ennemi ».






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L'hôtel de Pins

L'hôtel fut bâti dans les années 1530 pour Jean de Pins, conseiller au Parlement de Toulouse, évêque de Pamiers puis de Rieux. Ce prélat humaniste fameux avait effectué plusieurs ambassades en Italie pour François Ier, il entretint notamment des correspondances avec Erasme et Etienne Dolet pourtant mal vus par l'Eglise. En 1542, l'hôtel fut acquis par Jean de Nolet qui fit travailler Nicolas Bachelier à son agrandissement. Puis l'hôtel fut pratiquement démoli lors du percement de la rue du Languedoc à la fin du XIXème siècle, mais ses belles galeries à arcades ont été remontées en fond de cour.







Les portraits en médaillon sont une évocation des médailles et monnaies antiques que collectionnaient les humanistes toulousains. Ils représentent généralement le propriétaire et sa famille.








Au niveau de la corniche des mufles de lions servent de gargouilles :


C'est l'un des premiers hôtels de Toulouse à avoir eu des chapiteaux faisant directement référence aux ordres d'architecture, en ce cas l'ordre ionique, tiré de l'édition du traité de Vitruve publiée par Cesariano en 1521. Il est probable que Jean de Pins avait eu connaissance de cette édition alors qu'il était en poste à Milan.
Toutefois réaliser correctement la volute d'un chapiteau ionique nécessitait des connaissances mathématiques qui ne semblent pas avoir été employées ici, il était sans doute encore un peu tôt pour cela au début des années 1530 à Toulouse.




(Illustration tirée de l'exposition "Toulouse Renaissance" - 2018)


L'hôtel de Montval

Cet hôtel n'est pas du XVIème siècle mais du début du XXème. Toutefois ses éléments les plus notables (arcades, médaillons) viennent de l'hôtel de Pins vu ci-dessus, et plus précisément de la partie détruite par le percement de la rue du Languedoc dont plusieurs éléments Renaissance ont été réemployés ici. Certains médaillons sont l'oeuvre de Nicolas Bachelier.








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L'église de la Dalbade

Le portail Renaissance de la Dalbade fut réalisé par le tailleur de pierre Michel Colin. Dans la partie inférieure (1537-1539) il s'inspire du Val de Loire. Changement de style dans la partie supérieure à partir de 1540, l'ordre d'architecture fait son apparition et les chapiteaux classiques supplantent les chapiteaux composés et à figures qui caractérisaient l'art de la première Renaissance.
Le beau tympan en céramique date du XIXème siècle.





















Ce magnifique tympan en céramique, œuvre de Gaston Virebent au XIXème siècle, reproduit le tableau du "Couronnement de la Vierge" de Fra Angelico, peintre célèbre de la Renaissance italienne (XVème siècle). Il trouve donc parfaitement sa place dans le décor Renaissance de ce portail.



L'hôtel de Bagis

La façade en fond de cour de ce qui est maintenant appelé l'hôtel de pierre date de 1538.
Elle fut élevée pour le conseiller au parlement Jean de Bagis par l'architecte Nicolas Bachelier. Cette façade qui peut paraître quelconque à l’œil profane au regard des autres éléments maniéristes de l'hôtel, postérieurs de plusieurs décennies, marque pourtant une nouvelle étape dans la Renaissance toulousaine.
L'architecte laisse ici de côté l'accumulation décorative pour se concentrer sur la régularité de la façade et des percements, ainsi que sur la distribution intérieure avec l'escalier monumental établi en œuvre et au centre de la composition.

Le portail aux atlantes attribué à Bachelier par l'historiographie toulousaine semble bien être en réalité, lui aussi, postérieur de plusieurs décennies, on l'abordera donc plus tard.


Les fenêtres savantes "à l'antique" sont conçues comme autant de petits monuments isolés présentant l'ordre dorique.
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Hôtel de Lamamye
Construit vers 1540 pour le conseiller au parlement Guillaume Lamamye, cet hôtel vaut surtout pour la triple galerie joignant la tour d'escalier et l'aile en fond de cour (murée postérieurement).
Les colonnes cannelées montrent la superposition des ordres dorique, ionique et corinthien.







L'hôtel de Brucelles
Arnaud de Brucelles fut capitoul en 1534-35, mais c'est vers 1544 que son hôtel fut achevé. La petite cour accueille une imposante tour d'escalier richement décorée. Au-dessus de chaque fenêtre se trouve un personnage représenté à mi-corps - alternativement un homme et une femme - habillé à l'antique et à la mode du XVIème siècle. Les chapiteaux des colonnes entourant chaque fenêtre reprennent la superposition des ordres d'architecture classiques : dorique, ionique, corinthien.
A gauche de la tour, les balustres ornant les galeries superposées (non murées à l'origine) sont également à ordres corinthien, ionique et dorique.








Le personnage de la première fenêtre figure un homme vêtu à la romaine et tenant une corne d'abondance, il peut être vu comme une allégorie de la Fortune, une manière d'afficher la réussite du propriétaire.


A suivre...
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C'est sublime, et très exotique comme couleurs pour un nantais habitué au blanc tuffeau et aux toits d'ardoise ^^
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La ville rose porte bien son nom!
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*** Réorganisation du fil ***

Je procède à une réorganisation complète du fil, y compris des posts situés plus haut, pour trois raisons :
- L'exposition "Toulouse Renaissance" qui se tient en 2018 au musée des Augustins a porté à la connaissance du public de nombreuses informations nouvelles dont je me devais de rendre compte.
- Le nombre de photos par post devenu trop important, et ceux-ci trop denses, il fallait répartir la charge de téléchargement sur au moins deux pages (chacune faisant 20 posts).
- J'en profite enfin pour classer dans un ordre à peu près chronologique les divers éléments de ce fil.
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Reprise du fil...


Hôtel de Buet
C'est pour Guillaume de Bernuy, fils du célèbre marchand de pastel Jean de Bernuy, que Nicolas Bachelier édifia un nouveau corps de logis pour cet hôtel en 1544.
Guillaume de Bernuy ne suivit pas les traces de son père dans le négoce mais fit carrière au Parlement, tout comme d'ailleurs les descendants de Pierre d'Assézat un peu plus tard, ce qui illustre le fait qu'il n'était sans doute rien de plus prestigieux à Toulouse que de devenir parlementaire.

La travée de l'escalier à rampes droites est signalée par un portail monumental, morceau de bravoure devenant le rival ou le suppléant de la tour d'escalier dans son rôle honorifique.


Colonnes doriques jumelées sur l'angle, chapiteaux doriques s'inspirent de la version antique la plus sophistiquée de cet ordre : celle de la basilique Aemilia.

La fenêtre supérieure fait partie de la composition, encadrée de colonnes corinthiennes et de deux grands ailerons à volutes feuillagées. Les armes de Bernuy étaient sculptées dans un chapeau de triomphe et lisibles depuis le pied du portail (elles ne paraissent plus très visibles, sans doute martelées à la Révolution).








Bachelier a également sophistiqué la formule de la fenêtre "à l'antique" élaborée à l'hôtel de Bagis. Aux colonnes doriques surmontées de triglyphes étirés sont ajoutés des ornements maniéristes (cuirs découpés, masques...) développés dans les années 1530-1540 dans les décors intérieurs des châteaux royaux de Fontainebleau et de Madrid (ce dernier, désormais disparu, était situé dans le bois de Boulogne) et diffusés par des graveurs tel Jacques Androuet du Cerceau.




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Hôtel de Cheverry
Ayant racheté l'hôtel de Boysson aux structures gothiques, le capitoul Cheverry, grand négociant de pastel, le dota d'éléments Renaissance vers 1546, ce qui en fait un hôtel hybride.

Par exemple sur la tour capitulaire gothique a été placée une belle fenêtre Renaissance.




Des gravures ont inspiré des éléments du décor, comme ici ce modèle donné par Sebastiano Serlio (que l'on retrouve sur la fenêtre montrée ci-dessus).

(Illustration tirée de l'exposition "Toulouse Renaissance" - 2018)






Porte de Bachelier dans la cour du Capitole
En 1546 fut sculptée une porte qui donnait alors sur le petit consistoire (situé dans le donjon du Capitole). Attribuée à Nicolas Bachelier, elle fut ensuite déplacée à son emplacement actuel.


La déesse Pallas est entourée de deux figures féminines, l'une portant un bâton avec la croix du Languedoc (à l'origine le sculpteur avait figuré une chouette sur ce bâton, attribut de Pallas), l'autre brandissant une couronne de lauriers et une branche fleurie :


La représentation de Pallas illustre le fait que l'empereur Domitien (entre les années 51 et 96 de notre ère) donna à la ville le titre de Palladia Tolosa, la plaçant ainsi sous la protection de Pallas-Athéna, peut-être car elle était réputée dans le monde romain pour la qualité de son enseignement. De nos jours il arrive encore que Toulouse soit désignée comme "la cité palladienne" :




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Hôtel de Mansencal
Président au Parlement de Toulouse, Jean de Mansencal fit bâtir son hôtel vers 1547. L'hôtel souffrit beaucoup d'avoir été racheté par les dominicains au XIXème siècle, qui en démolirent une grande partie pour construire une chapelle (également détruite depuis). Il a conservé toutefois une des plus belles tours de la ville, haute de 30 mètres.

La façade sur rue :








Côté cour, pour la première fois apparaît l'ambition de constituer une façade entière à l'ordonnance rigoureuse mettant en œuvre les ordres classiques, annonçant celles de l'hôtel d'Assézat. Ici les arcades et pilastres sont cependant taillés dans la brique, alors que la pierre sera utilisée à l'hôtel d'Assézat.


Gravure de la façade arrière avant sa destruction partielle par les dominicains. N'ont été conservées que les deux travées de droite :






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Porte du Grand consistoire au Louvre
En quête de renommée et en concurrence sociale avec les parlementaires, les capitouls cherchèrent à marquer et honorer leur fonction par les arts.
Dans ce contexte la porte fut un morceau d'apparat privilégié, fixant l'essentiel des reliefs et des matériaux qui honorent une façade.
En 1551-1552 les capitouls commandèrent à Guiraud Mellot la porte de la salle du Grand consistoire, où se tenaient la justice municipale et les assemblées du conseil de ville.
Les blasons d'origine des capitouls de 1551 n'ont survécu que parce que les capitouls de 1628 avaient placé par-dessus une frise en stuc avec leurs propres blasons, car ils attendaient la venue de Richelieu... et ce sont eux que la Révolution détruisit !
Les huit blasons des capitouls de l'année ainsi que celui de Toulouse sont donc toujours intacts sur la frise, ils ont eu plus de chance que les armes du roi et le collier de l'ordre de Saint-Michel trônant au sommet dans un grand cartouche à cuirs découpés. Deux imposantes gaines ornées de feuilles et de tresses flanquent l'arc et sont surmontées de masques grimaçants. Cet abondant décor souligne la magnificence municipale tout en faisant référence à la mode royale. Démontée et adjugée en 1880, cette porte fut réinstallée dans le jardin de Maurice Fenaille à Neuilly/Seine avant d'être cédée au Musée du Louvre où elle peut désormais être admirée.














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Maison d'Auger Ferrier.
Auger Ferrier suivit ses études à Montpellier et fut également astrologue. Il fut médecin de Catherine de Médicis à Paris, avant de s'installer à Toulouse il visita aussi l'Italie.

C'est dans la cour intérieure que se déploie cette façade aux fenêtres Renaissance :




On distingue la représentation d'Indiens d'Amérique, motif à la mode dans les châteaux et riches demeures de cette époque.




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Le portail du collège de l'Esquile
En 1551, une réforme touche les vieux collèges de Toulouse. Plusieurs d'entre eux sont fusionnés avec le collège de l'Esquile, créé en 1417 mais refondé à cette occasion.
L'architecte Nicolas Bachelier fut chargé de la construction du nouveau portail sur la rue du Taur en 1556.
Le bossage rustique un-sur-deux évoque la solidité et une ancienneté vénérable, son traitement vermiculé renvoie aux sophistications de l'architecte du roi Pierre Lescot. L'architrave et les claveaux qui l'interrompent sont inspirés de compositions du Livre extraordinaire de Sebastiano Serlio, sans toutefois en copier une particulièrement.
La frise est décorée de blasons de capitouls (martelés à la Révolution) et de chutes de rubans tenues par des masques grimaçants. Plus haut, l'attique est scandé de termes enroulés inspirés d'un modèle bellifontain d'Androuet du Cerceau. Les cartouches accueillaient initialement les blasons du collège, de la ville et de la province. Un édicule dorique couronne le tout, y trônaient les armoiries fleurdelisées, la couronne royale et le grand collier de l'ordre de Saint-Michel. Tout au sommet, trois croissants de lune renvoient à l’emblème d'Henri II.
Tous ces raffinements ornementaux évoquaient savamment l'ancienneté, l'autorité et l'instruction.








Le collège de l'Esquile fut également doté en 1583 d'un cartouche célébrant probablement une étape importante de la vie du collège, orné de décors Renaissance telles des cornes d'abondance :
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